lundi 26 septembre 2011

Les miracles, ça se mérite


      Le France-NZ n’aura cette fois pas donné lieu à un miracle. Après cinq premières minutes prometteuses pour les Bleus, les Blacks ont déferlé sur notre ligne d’en-but, montrant un enthousiasme énorme – voire une férocité – quand ils attaquaient. Quel talent dans ces lignes arrières, parfaitement lancées par le meilleur numéro dix du monde et des avants qui serrent les rangs !

    Les néo-zélandais ont définitivement enterré leurs vieux démons. On se rend peu compte, ici, du désordre causé par les victoires françaises des quinze dernières années : la glorieuse tournée de 1994, avec cet essai du bout du monde, à la dernière minute, marqué au nez et à la barbe de la nation rugbystique par excellence, le renversement improbable durant la demi-finale de 1999, enfin le quart de Cardiff il y a quatre ans, quand les Blacks méritaient la victoire finale dans la compétition.

Ne pas perdre son rugby

    A chaque fois, nous avons brisé malgré nous les espoirs des quatre millions de néo-zélandais, soucieux que leur lointain pays figure en bonne position sur la scène internationale. Pour cette nation située aux antipodes, le rugby constitue la meilleure occasion de se distinguer et de s’intégrer au monde.

Mais il y a pire. En 1999 et en 2007, les Blacks étaient favoris, et les Bleus ont réussi à les faire déjouer. Nous devons ces exploits autant à notre panache qu’au dérèglement psychologique des joueurs néo-zélandais, qui ont alors perdu leur rugby. C’est étrange, mais les Blacks ont, au fil des ans, nourri un véritable complexe face à la France. Et parce que tous les néo-zélandais ont pratiqué le rugby dans leur jeunesse, parce que ce sport reste leur premier ambassadeur, ces échecs ont touché plus profondément qu’on ne le pense la population de l’île.

    Cette fois-ci, chez eux, les Blacks n’avaient pas le droit de déjouer. Il y a longtemps qu’ils avaient intégré l’idée. Leurs vieux démons tricolores, ils les ont effacés il y a deux ans, à Marseille. S’obligeant à n’écouter que leurs propres forces, ils avaient remporté la partie haut la main (39-12) contre une équipe de France qui sortait d’un match prometteur face à l’Afrique du Sud. Le haka effectué alors avait été le plus intense des dernières années, toutes nations confondues.
Désormais, les néo-zélandais ont l’esprit plus libre pour le sacre suprême.

Les miracles se méritent

    Quant aux Bleus, un « coup » aurait été possible si nous avions une équipe. Mais après sept années de changements ultra-fréquents (ère Laporte), puis quatre ans de révolution permanente (ère Lièvremont), nous ne pouvions espérer autre chose que de faire bonne figure. Quand un joueur n’a jamais aucune certitude pour le lendemain, il perd l’esprit d’équipe, voire sa confiance. Et il cherche d’abord à prouver individuellement plutôt qu’à jouer simplement au rugby. Impossible dans ces conditions de vaincre la meilleure nation du monde.

    Nous possédons néanmoins un vivier extraordinaire. On ne sait s’il pourra s’exprimer durant la coupe du monde, mais il faut déjà penser à l’après. Alors que des fers de lance vont bientôt quitter les Bleus (Servat, Heymans) et que d’autres se rapprochent lentement vers la fin de carrière (Mas, Rougerie, Dusautoir, Clerc, Traille), certains joueurs au potentiel énorme ont montré leur talent et leur abnégation face à l’adversité (Picamoles, Médard, Mermoz…). C’est avec eux qu’il faudra construire une équipe.
    Il sera également nécessaire de trouver un numéro dix régulier et complet. En 1999, nous avions le meilleur ouvreur que la France ait connu depuis l’avènement du professionnalisme (Christophe Lamaison). En 2007, le n°10 le plus prometteur des dernières années (Beauxis).

En dépit des impressions frivoles, les miracles ne tombent pas du ciel. « Aide-toi et le ciel t’aidera ». Les miracles, ça se mérite.


PS : victoire de l’Argentine sur l’Ecosse, avec de la réussite. A moins d’un exploit contre l’Angleterre, le Quinze du chardon n’accédera pas aux quarts de finale pour la première fois depuis 1987. L’occasion de remettre les choses à plat dans une Ecosse qui traverse la plus grave crise rugbystique de son histoire. Quant à l’Argentine, en perte de vitesse, elle avait à cœur de justifier son entrée prochaine dans le tri-nations sudiste.

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