mardi 22 novembre 2011

Vers une résurrection écossaise ?


      C’est la grande nouveauté de ce début de coupe d’Europe : les franchises écossaises semblent être compétitives. A première vue, c’est une incongruité.

    En effet, l’Ecosse traverse depuis dix ans la plus grave crise de son histoire : vivier de joueurs réduit à la portion congrue, désintérêt du public (seulement 5000 spectateurs à Murrayfield le week-end dernier pour le match d’Edimbourg), problèmes financiers dans les clubs et à la Fédération.

Certains dirigeants étaient conscients des problèmes profonds du rugby écossais, tel l’ancienne gloire John Jeffrey, qui estimait que cette crise reflétait un changement sociétal. Par petits pas, des opérations furent entreprises ces dernières années, visant toutes à redorer le blason du sport national dans le cœur des jeunes.

Déferlement de jeunes talents

    Depuis quelques temps, il se murmurait au fin fond des vallées encaissées que des joueurs prometteurs allaient arriver sur le devant de la scène. A l’instar de la brume qui envahit fréquemment les collines d’Ecosse, un filtre nous empêchait de discerner la pertinence des rumeurs.
La saison des clubs écossais l’an passé ne changeait pas des quinze dernières années : une litanie de défaites en coupe d’Europe. Quant au Quinze national, il a été éliminé dès les phases de poules lors de la dernière coupe du monde, une première depuis la création de cette compétition.

    Il aura fallu attendre le mois de novembre 2011 pour voir la brume se dissiper. La vision est éclatante.

Emmené par Harry Leonard à l’ouverture (19 ans), Matt Scott en premier trois-quarts centre (21 ans), ou encore Stuart McInally au poste de n°8 (21 ans), la franchise d’Edimbourg a gagné ses deux premiers matchs en coupe d’Europe et mène dans sa poule.
L’étincelle de la gagne semble revenue dans le camp écossais, avec des victoires d’un point contre les London Irish et le Racing-Métro. La rencontre face à l'équipe de Berbizier est symbolique de la nouvelle dynamique écossaise : mené de 21 points en seconde mi-temps, Edimbourg inversa la vapeur, étouffant le club parisien par son enthousiasme, et gagna 48-47.

    Glasgow semble également redevenir compétitif, avec une victoire contre Bath, avant sa nette défaite chez les champions d’Europe en titre (38-13 contre le Leinster). Pas moins d’un tiers de l’équipe-type est âgé de moins de 22 ans, et des joueurs comme l’arrière Stuart Hogg (19 ans) retiennent déjà l’attention.

Or, des ouvreurs talentueux, des trois-quarts compétitifs, c’est tout ce qui manquait au Quinze du chardon ces dernières années, lequel n'a gardé la tête hors de l'eau que grâce à ses avants très mobiles.

La France en retard

    Ce vent de fraicheur, on le retrouve également au Pays de Galles, où Llanelli a remporté ses deux premiers matchs malgré la titularisation de très jeunes joueurs (un n°8 âgé de 22 ans, une paire de centre de 22 ans, un ailier de 19 printemps…). Même l’Irlande voit l’éclosion de garçons prometteurs, comme le n°13 O’Malley (23 ans) qui remplace provisoirement mais avec succès O’Driscoll au Leinster, ou le troisième-ligne Peter O’Mahony (22 ans), intéressant avec le Munster.

    Cette dynamique très positive dans les pays celtes contraste avec ce qui se pratique en France, où le déferlement de joueurs étrangers confirmés freine le lancement des jeunes talents dans nos clubs. Il faudra bien un jour ouvrir le débat sur cette évolution marquée du sceau du professionnalisme, éminemment pénalisante pour notre rugby.

mercredi 26 octobre 2011

Les Blacks, enfin


     Dimanche dernier, nos joueurs ont fait honneur à notre pays. Ridiculisés en poule et en demi-finale, insultés par les médias néo-zélandais et raillés par le public, ils ont eu contre la Nouvelle-Zélande un sursaut d’orgueil rare.

Le plus incroyable dans le déroulé de cette finale réside dans la capacité tricolore d’attaquer et de défendre en restant soudé, malgré la révolution permanente opérée par le sélectionneur depuis quatre ans. Chaque joueur a tenu sa place et son rôle. L'équipe de France a été belle à voir.

Mérité, les All-Blacks

    Certes, nous avons plus ou moins dominé cette partie ; certes, l’arbitre avait décidé de laisser gagner les Blacks. Fort heureusement, nous ne sommes pas champions du monde. Comment se serait-on regarder dans la glace si tel avait été le cas ? Deux défaites en poule, une désillusion contre l’Italie dans le Tournoi, une rouste historique face à l’Australie il y a un an…
Et si nous avions volé la coupe aux Blacks dans leur antre de l’Eden Park ? Eux qui ont largement dominé non seulement la compétition, mais les six ou sept dernières années au niveau international ?

Rarement l’expression « LEUR coupe du monde » a été aussi vraie. C’était leur heure. Et grâce à leur victoire, le grand rendez-vous international créé en 1987 garde une légitimité.

Un premier bilan

    Deux faits, selon nous, ressortent nettement des six semaines de rencontres aux antipodes.

Le premier, c’est qu’une équipe a sur-dominé la compétition (la Nouvelle-Zélande). La seule fois où les Blacks ont été inquiétés, c’était en finale, quand ils ont eu du mal à évacuer l’énorme pression qui pesait sur leurs épaules.

En second lieu, le niveau a été relativement peu élevé – tout du moins très irrégulier – et la logique n’a pas été respectée par rapport aux phases de poule. Non seulement une équipe (la France) est sortie de son groupe avec deux défaites, une grande première, mais les nations présentes en demi-finales comptaient déjà quatre échecs dans la compétition !
Or, depuis 1987, jamais on n’était monté au-delà de deux unités ; et encore, cela ne s’était produit qu’en 2007, année qui avait vu pour la première fois une nation vaincue en phase de poule accéder à la finale (l’Angleterre).

Cela fait beaucoup de retournements improbables pour une compétition censée être relevée et passionnante.

Baisse de niveau chez les buteurs ?

    Autre fait marquant, la faillite des buteurs. Il est rare de voir autant de ratés, jusqu’en finale (deux pénalités faciles manquées par Weepu). Beaucoup mettent en cause le nouveau ballon, apparemment difficile à ressentir lors des coups de pied. Mais n’y a-t-il pas tout simplement une baisse de niveau ?

Il est des époques où la réussite des pénalités conditionne une victoire. Visiblement nous n’en vivons pas une. Plusieurs nations lancent des botteurs « improvisés » avec plus ou moins de réussite (NZ après la blessure de Carter, Australie, France évidemment), d’autres changent de tireurs en plein milieu d'une partie ; la seule qui possède un métronome de la trempe d’un Jenkins ou d’un Wilkinson des grandes années est l’Afrique du Sud, avec Morné Steyn, mais elle a été éliminée dès les quarts de finale.

    Dans cette coupe du monde, des nations ont agréablement surpris (Galles, Argentine) et d’autres ont beaucoup déçu (Angleterre, Australie). Certaines se sont construit un avenir (l’équipe de France) et l’une d’entre elle demeure trois crans au-dessus (Nouvelle-Zélande). Pour l’avenir, ceux qui pensent que les Blacks vont lever le pied risquent d’être déçus : 2012 pourrait encore être une « année noire »…

lundi 17 octobre 2011

Une drôle de coupe du monde...

    
     Etonnante, mais pas passionnante à vrai dire…
Si ce n’était l’intérêt immense pour nous autres Français de voir une finale Blacks-Bleus à l’Eden Park, nous dirions même que cette coupe du monde frise le n’importe quoi.

    Pour illustrer notre propos, il n’est qu’à regarder les demi-finales. Une équipe présente dans le dernier carré (la France) a subi deux défaites en matchs de groupe. Jamais une nation n’était sortie de cette phase après avoir connu deux échecs. Une autre (l’Australie) comptait déjà une défaite et avait terminé deuxième de sa poule.
La qualité des demi-finales ne trompe pas. Les Bleus ont gagné péniblement d’un petit point contre une équipe de Galles réduite à quatorze au bout de vingt minutes (carton rouge rarissime à ce niveau). Les Australiens se sont faits étrillés 20 à 6 par une Nouvelle-Zélande largement supérieure.

Des quarts peu logiques

    Dès les quarts, il soufflait un vent de farce. L’Afrique du Sud avait sur-dominé une Australie étonnamment amorphe mais avait perdu néanmoins, ce qui nous a privé du grand duel tant attendu entre les Boks et les Blacks. L’Irlande, qui avait fait le plus dur en battant les Aussies en poule, a été coupable d’un péché d’orgueil contre le Pays de Galles malgré son expérience. L’équipe de France s’est enfin réveillée et a réalisé une première mi-temps d’anthologie contre une équipe d’Angleterre très décevante tout au long de la compétition ; victoire surprise après nos deux défaites en poule.

La Nouvelle-Zélande, dernier pilier du rugby mondial ?

    En fait, des huit équipes engagées en quarts de finale, seules le Pays de Galles, l’Argentine et – bien-sûr – la Nouvelle-Zélande sont restées fidèles à elles-mêmes et ont tenu leurs rôles.

Les Blacks, en particulier, semblent le dernier pilier encore debout d’une ère professionnelle caractérisée par la frénésie. Jamais ils ne se prennent de roustes, jamais ils ne déçoivent. Ils dominent le rugby mondial depuis six ou sept ans et en recueillent désormais le fruit. Leur parcours en coupe du monde est limpide. Ils n’ont jamais été inquiétés dans la compétition malgré la blessure de Daniel Carter – le meilleur ouvreur de la planète. C’est dire leur avance sur les autres nations.

   Ils devront néanmoins se méfier contre la France. Pour l’occasion, les Bleus devraient se magnifier. Ces derniers sont en finale alors qu’ils n’ont bien joué qu’une seule mi-temps dans toute la compétition (la 1ère période contre l’Angleterre). Pour eux, la coupe du monde ne fait que commencer. Ce d’autant plus qu’on sent un profond soulagement à l’idée du départ prochain de Marc Lièvremont.

Ce dernier, qui avait eu un instant de discernement après la défaite contre les îles Tonga (« Qu'ils [les joueurs] fassent sans moi, je ne demande que ça, c'est leur aventure »), est retombé dans ses travers en traitant certains Bleus de « sales gosses égoïstes » et en parlant de « quelques clopes fumées en cachette » sous prétexte d’une sortie en ville après la victoire contre le Pays de Galles. Il ne s’agit pas seulement d’un énième dérapage, mais d’une absence totale de connaissance des joueurs tricolores, de l’âme française.

Prendre du plaisir

    Les Bleus présents en Nouvelle-Zélande n’ont ni envie ni besoin d’un instituteur omnipotent au-dessus de leur épaule. Ce sont des hommes qui savent que notre place en finale est totalement imméritée. Nous n’avons pas d’équipe, et se préparer en faisant comme si c’était le cas est le meilleur moyen de se faire étriller par les Blacks.

Tout ce dont nos joueurs ont besoin est de s’échapper de la promiscuité de l’hôtel, du regard du sélectionneur et des médias, de profiter de leurs derniers instants à l’autre bout du monde, de ne pas craindre une non sélection pour la finale sous prétexte d’une sortie en ville. De respirer et de ne s’appliquer que lors des entrainements, lesquels doivent reposer sur des bases simples. Si elle prend plaisir, l’équipe de France montrera un tout autre visage dimanche. Allez les Bleus !

lundi 26 septembre 2011

Les miracles, ça se mérite


      Le France-NZ n’aura cette fois pas donné lieu à un miracle. Après cinq premières minutes prometteuses pour les Bleus, les Blacks ont déferlé sur notre ligne d’en-but, montrant un enthousiasme énorme – voire une férocité – quand ils attaquaient. Quel talent dans ces lignes arrières, parfaitement lancées par le meilleur numéro dix du monde et des avants qui serrent les rangs !

    Les néo-zélandais ont définitivement enterré leurs vieux démons. On se rend peu compte, ici, du désordre causé par les victoires françaises des quinze dernières années : la glorieuse tournée de 1994, avec cet essai du bout du monde, à la dernière minute, marqué au nez et à la barbe de la nation rugbystique par excellence, le renversement improbable durant la demi-finale de 1999, enfin le quart de Cardiff il y a quatre ans, quand les Blacks méritaient la victoire finale dans la compétition.

Ne pas perdre son rugby

    A chaque fois, nous avons brisé malgré nous les espoirs des quatre millions de néo-zélandais, soucieux que leur lointain pays figure en bonne position sur la scène internationale. Pour cette nation située aux antipodes, le rugby constitue la meilleure occasion de se distinguer et de s’intégrer au monde.

Mais il y a pire. En 1999 et en 2007, les Blacks étaient favoris, et les Bleus ont réussi à les faire déjouer. Nous devons ces exploits autant à notre panache qu’au dérèglement psychologique des joueurs néo-zélandais, qui ont alors perdu leur rugby. C’est étrange, mais les Blacks ont, au fil des ans, nourri un véritable complexe face à la France. Et parce que tous les néo-zélandais ont pratiqué le rugby dans leur jeunesse, parce que ce sport reste leur premier ambassadeur, ces échecs ont touché plus profondément qu’on ne le pense la population de l’île.

    Cette fois-ci, chez eux, les Blacks n’avaient pas le droit de déjouer. Il y a longtemps qu’ils avaient intégré l’idée. Leurs vieux démons tricolores, ils les ont effacés il y a deux ans, à Marseille. S’obligeant à n’écouter que leurs propres forces, ils avaient remporté la partie haut la main (39-12) contre une équipe de France qui sortait d’un match prometteur face à l’Afrique du Sud. Le haka effectué alors avait été le plus intense des dernières années, toutes nations confondues.
Désormais, les néo-zélandais ont l’esprit plus libre pour le sacre suprême.

Les miracles se méritent

    Quant aux Bleus, un « coup » aurait été possible si nous avions une équipe. Mais après sept années de changements ultra-fréquents (ère Laporte), puis quatre ans de révolution permanente (ère Lièvremont), nous ne pouvions espérer autre chose que de faire bonne figure. Quand un joueur n’a jamais aucune certitude pour le lendemain, il perd l’esprit d’équipe, voire sa confiance. Et il cherche d’abord à prouver individuellement plutôt qu’à jouer simplement au rugby. Impossible dans ces conditions de vaincre la meilleure nation du monde.

    Nous possédons néanmoins un vivier extraordinaire. On ne sait s’il pourra s’exprimer durant la coupe du monde, mais il faut déjà penser à l’après. Alors que des fers de lance vont bientôt quitter les Bleus (Servat, Heymans) et que d’autres se rapprochent lentement vers la fin de carrière (Mas, Rougerie, Dusautoir, Clerc, Traille), certains joueurs au potentiel énorme ont montré leur talent et leur abnégation face à l’adversité (Picamoles, Médard, Mermoz…). C’est avec eux qu’il faudra construire une équipe.
    Il sera également nécessaire de trouver un numéro dix régulier et complet. En 1999, nous avions le meilleur ouvreur que la France ait connu depuis l’avènement du professionnalisme (Christophe Lamaison). En 2007, le n°10 le plus prometteur des dernières années (Beauxis).

En dépit des impressions frivoles, les miracles ne tombent pas du ciel. « Aide-toi et le ciel t’aidera ». Les miracles, ça se mérite.


PS : victoire de l’Argentine sur l’Ecosse, avec de la réussite. A moins d’un exploit contre l’Angleterre, le Quinze du chardon n’accédera pas aux quarts de finale pour la première fois depuis 1987. L’occasion de remettre les choses à plat dans une Ecosse qui traverse la plus grave crise rugbystique de son histoire. Quant à l’Argentine, en perte de vitesse, elle avait à cœur de justifier son entrée prochaine dans le tri-nations sudiste.

lundi 19 septembre 2011

L'Irlande, historique et logique

      
      « Grosse surprise », « exploit », « un succès favorisé par la pluie »… Nous nous étonnons de l’incrédulité des journalistes et de nombreux consultants après la victoire de l’Irlande sur l’Australie (15-6). Si l’issue de la rencontre constitue un authentique exploit pour l’Irlande, c’est au regard de son histoire longue : à notre connaissance, jamais un Quinze du Trèfle n’avait gagné contre une nation du sud dans l’autre hémisphère.

La confiance intime d’un groupe

     Pour notre part, nous avions anticipé il y a des mois la qualification probable de l’Irlande en demi-finales de la coupe du monde pour la première fois de son histoire (voir « L’Irlande, la plus dangereuse pour l’hémisphère Sud ? » du 1er avril 2011).  Non seulement les hommes en Verts sont les plus réguliers dans le Nord depuis des années, mais, « le groupe irlandais nous semble être encore plus homogène et plus serein que par le passé, plus sûr de lui, car ayant une conscience très fine de ses forces et de ses faiblesses » (message du 10 février).

Qui ne voit qu’ils se retrouvent dans les moments importants ? Les observateurs inattentifs du court terme ont-ils déjà oublié l’extraordinaire victoire contre l’Angleterre dans le dernier Tournoi (24-7) ? Et la finale renversante du Leinster dans la coupe d’Europe la plus relevée de tous les temps (victoire irlandaise 33-22 contre Northampton) ?
Il est des rencontres qui ne trompent pas.

Les fondamentaux : le jeu et l’esprit

     Le déroulé du match montre une nouvelle fois l’importance cruciale des fondamentaux dans le rugby. Dans le jeu, tout d’abord, avec une victoire acquise grâce à la nette domination des avants irlandais sur le pack wallabie.

La dimension humaine, ensuite : quand un grand capitaine qui a initié et vécu la plus grande période qu’ait jamais connu le rugby irlandais affirme que « c’est maintenant ou jamais » (Brian O’Driscoll à ses équipiers, avant le match), on l’écoute, on incorpore l’idée au plus profond de soi. Que pèsent à côté les talentueux mais inexpérimentés arrières australiens ?
Samedi, alors que le scénario tournait à leur désavantage, les Beale (22 ans), Cooper (23 ans) ou McCabe (23 ans) étaient hagards, ressemblant à des enfants perdus et orphelins. Leur temps viendra, ça ne fait pas de doute.

     Avec ce succès, l’Irlande s’ouvre en grand les portes de la demi-finale. Elle devra éviter l’écueil gallois en quarts. Le Quinze du Poireau a battu de peu les îles Samoa (17-10). Il devra encore vaincre les Fidji, ce qui ne sera pas une mince affaire, mais la compétitivité retrouvée de leurs avants et de joueurs comme Jamie Roberts (le meilleur n°12 de l’hémisphère Nord) leur donnent un avantage certain.

Un mot sur les Bleus

     Victoire tranquille de l’équipe de France contre des canadiens courageux et brutaux. Beaucoup de nos joueurs ont une classe naturelle, l’ambiance sur le terrain semble bonne, c’est de bonne augure pour le choc face à la Nouvelle-Zélande. Deux petits bémols : la faiblesse relative de notre triangle 10-12-13 face à celui des Blacks, et un sélectionneur qui continue d’alourdir l’ambiance en traitant ses joueurs comme s’ils étaient des écoliers de primaire.
Advienne que pourra !

mercredi 14 septembre 2011

En attendant les deux gros morceaux...

   
       Après la vomie de matchs de préparation, la Coupe du monde a bien commencé. Non par un jeu flamboyant mais par la petitesse des écarts et l’âpreté des combats dans les regroupements, comme l’ont montré les Galles-Afrique du Sud et Angleterre-Argentine. Les résultats sont logiques (victoires des Boks et des Anglais), mais le suspens aura duré jusqu’au coup de sifflet final.

    La compétitivité de l’Argentine et de Galles renforce l'attrait de leurs poules respectives : la première peut empêcher l’Ecosse d’accéder aux quarts de finale pour la première fois de son histoire, la seconde devra se frotter à des îles du Pacifique très compétitives (voir message de juillet dernier : http://lerugbyinternational.blogspot.com/2011/07/l-es-samoa-sont-en-grande-forme.html).
Ainsi, le Galles-Samoa promet des étincelles !   Gros combat en perspective pour la deuxième place dans les groupes B et surtout D.


Australie-Irlande : pour s'ouvrir les voies de la finale

    Ces rencontres rendent le temps agréable avant les deux gros morceaux des phases de poule : l’Australie-Irlande de samedi prochain, puis le Nouvelle-Zélande-France. Nous attendons le premier match avec impatience : le vainqueur aura de grandes chances d’accéder aux demi-finales en jouant - en quarts - contre le deuxième de la poule de l’Afrique du Sud (Galles, Samoa ou Fidji). En outre, il éviterait sans doute la Nouvelle-Zélande en demie.


Les Bleus, comme à l'habitude

    Concernant le premier match de la France, nous ne sommes pas spécialement inquiets de la performance très moyenne contre le Japon. Les matches de poule n’ont jamais été notre fort, nous ne nous y sentons que très rarement en état de grâce ou d’harmonie.

Nous renvoyons à l’analyse toujours très pertinente d’Alain Penaud sur l’Equipe.fr, qui déplore l’absence de fond de jeu, notamment dans les lignes arrières :       « … Après, je ne dis pas que tout est la faute de Lièvremont. C’est le rugby français qui est dans cet état depuis l’ère Laporte, voire l’ère Villepreux. On est très conservateurs. On s’appuie sur une grosse mêlée, une grosse touche, mais derrière, il n’y a pas grand-chose. (…)  Quand on voit les qualités intrinsèques des joueurs et le potentiel de cette équipe et ce que cela donne en terme d’organisation, il y a de quoi être frustré ».
Nous ajouterons pour notre part que les changements ultra fréquents à la charnière depuis dix ans sont l’une des causes probables de cet état de fait.

    Un petit mot sur les Boks, qui nous apparaissent profondément et secrètement fragilisés sur le plan mental, et ce depuis quelques années. Les raisons ne sont pas sportives, mais sociétale et politique. Nous y reviendrons. Alors que les sud-africains, avec leurs joueurs extraordinaires, auraient dû concurrencer les Blacks ces dernières années, le duel a tourné court. Cela pourrait encore être le cas durant cette Coupe du monde.

    En maintenant un œil sur l’Angleterre et les îles du Pacifique, nous maintenons notre pronostic : victoire finale de la Nouvelle-Zélande, et qualification de l’Irlande en demi-finale pour la première fois de son histoire.

jeudi 21 juillet 2011

Attention aux îles du Pacifique...


    Les Samoa sont en grande forme. Eternels premiers de la classe des îles du Pacifique, bien que parfois talonnés par les gazelles fidjiennes, les hommes en bleus viennent de réaliser l’un des plus grands exploits de leur histoire en battant l’Australie pour la première fois. A Sidney, en plus.
Certes, les wallabies n’avaient aligné qu’une équipe bis, impératif d’un rugby pro qui montre ici ses effets pervers. La charnière Genia-Cooper n'était pas titulaire et quatre des cinq arrières présents en Europe lors des tournées d’automne ne jouaient pas. Mais le résultat final demeurera à jamais.
Voici un petit résumé, avec le haka et les essais (commentaires en anglais) :




   Le Quinze australien n’a pas réussi à renouveler ce que la France avait produit lors de sa tournée à Apia en 1999. Avant un déplacement en Nouvelle-Zélande, l’équipe de France avait tenu à jouer un test contre les Samoa dans ce qui constituait un match-piège. Après avoir dominé en première mi-temps, ils furent rejoints au score par des îliens soudainement devenus féroces, impeccables dans le jeu à la main, intraitables en défense, au-delà de la limite autorisée dans les placages. Une tempête tropicale et deux cartons rouges plus tard (pour les Samoa), la France l’emporta en marquant deux essais dans les toutes dernières minutes.

   Douze années ont passé. Contre l’Australie et avant elle lors des tournées d’automne, le Quinze samoan a donné l’impression d’être plus régulier et mieux organisé. L’habitude de jouer dans les grands championnats des hémisphères Nord et Sud, sans doute. Un management renouvelé, aussi. Mais d’abord et avant tout une longue expérience dans le rugby international, allié à une endurance et une force physique exceptionnelle qui sont le grand atout des joueurs des îles. Alors que le professionnalisme a profondément creusé les performances entre les nations déjà présentes au haut niveau et les autres (arrêt des rencontres avec les nations mineures – pas assez rémunératrices –, entraînement corporel beaucoup plus intense), les îles du Pacifique, naturellement au top sur le plan physique, ont besoin d’un minimum de rigueur dans la gestion du jeu. C’est celle-là même qui leur font souvent défaut, mais avait permis aux Fidji d’atteindre les quarts de finale lors de la dernière coupe du monde ; encore elle qui a rendu possible la victoire des îles Samoa contre l’Australie cette année.

   Les Samoa confirment ainsi les bonnes performances réalisées en novembre dernier (défaites de 10 points contre l’Irlande, de 13 pts contre l’Angleterre et de 3 petits points contre l’Ecosse à la dernière minute). Ils vont être de sérieux rivaux aux gallois et aux sud-africains lors de la prochaine coupe du monde.

   Les tournées de l’automne nous avaient donné de bonnes indications pour connaître les forces en présence en 2011. Nous avions alors distingué trois thèmes principaux (voir http://lerugbyinternational.blogspot.com/2011/02/dernier-regard-sur-les-tournees.html) : la Nouvelle-Zélande domine le rugby international comme rarement équipe a dominé, et gagnera enfin la coupe de monde ; l’Angleterre est de retour ; les îles du Pacifique redeviennent très compétitives. Plus que jamais, nous confirmons ces vues.

mercredi 22 juin 2011

Espoirs pour le rugby tricolore


     Un espoir suite aux belles performances des Bleuets de vingt ans dans la coupe du monde de la catégorie ? Certainement. Une belle génération prend forme. Mais c’est sur le championnat de France que nous voulons porter notre regard.

Avec le Top 14 et la finale Toulouse-Montpellier (15-10), nous avons senti une arrivée d’air frais sur le rugby national.

   Quelques images de la finale nous reviennent en mémoire, des images symboliques et représentatives d’une base rugbystique en pleine vitalité dans notre pays.

   Nous retenons celle de Guy Novès à la fin de la rencontre, son visage profondément heureux, ses yeux humides, son regard et son sourire de chef sage qui semblaient dire « au revoir » à un club qu’il a dirigé de longues années. Toulouse, une équipe et une ville au sommet du rugby de l’hémisphère Nord, qui doit beaucoup à la politique de long terme menée par leur entraîneur. Cette longue vue, qui a tant manqué à l’équipe de France ces dix dernières années et qui fait défaut à sa fédération (voir message du 15 mars : http://lerugbyinternational.blogspot.com/2011/03/n-ous-nous-rejouissons-pour-les.html ), va-t-elle être prêtée au Quinze national après la coupe du monde ? On l’espère.

   L’arrivée d’un Guy Novès en équipe de France ne ferait pas tout. Il faut que l'environnement soit sain. Il semble l’être. Il est remarquable que Toulouse ait été confronté en finale au Montpellier du tout nouvel entraîneur Fabien Galthié. Un ancien joueur de grande classe, qui aime si profondément son sport qu’il est pris de frissons puissants quand il le commente à la télé. Un homme qui aime la rugosité du rugby, les émotions qu’il porte et les identités qu’il transmet.

   La finale, le grand Pierre Berbizier n’en a même pas goûté (défaite d'un petit point en demi contre Montpellier). Berbizier, le chef incontestable, l’homme qui sait reconnaître les exceptions et donne un chacun son rôle naturel, le sage du rugby français…
Il nous semble que règnent entre tous ces hommes, et les innombrables anonymes de ce billet, une forme de reconnaissance intime de l’autre, de son honneur d’homme. Un profond respect, en somme. Un peu à l’image de Jean-Pierre Elissalde, cet ancien joueur au-dessus du lot sur le plan mental, désormais co-entraîneur du Stade Toulousain, venu réconforter longuement à la fin du match le jeune ailier montpelliérain Pailhaugues, secoué de pleurs après avoir été victime d’un carton jaune injuste à dix minutes du coup de sifflet final.

   Au-delà de la constitution d’une tête de pont remarquable dans le rugby français, semble se mettre en place une reprise en main naturelle et progressive du rugby national par la base.
La base ? Oui, celle-là même dont on peut douter qu’un Max Guazzini fait partie, par exemple. Lui qui a régné sur le championnat au début de la décennie, mais dont l’actualité montre la grande ambivalence : le plus important est-il son calendrier du Stade Français et le commerce, ou son équipe ?
La base, dont est plus proche une Ligue nationale à l'influence grandissante (formée des représentants du rugby de l’élite), face à une fédération encore toute puissante, et largement marquée par le réflexe frénétique du changement permanent. Une fédération dirigée jusqu’il y a trois ans par un ancien fonctionnaire des douanes, Bernard Lapasset, lequel avait nommé les deux précédents sélectionneurs sur des critères que nous sommes rétrospectivement curieux de connaître. Une fédération dont le président actuel, Pierre Camou, propose la constitution de provinces pour copier le rugby du sud, au moment même où le top 14 connait ses plus grands succès.

   Porté par des personnages d’exception, le rugby national revient petit à petit à ses origines. Ce rugby là sait qui il est et il s'appuie sur ses forces. A une époque où le professionnalisme commence à faire sentir ses premiers effets pervers, où la fédération a rarement été aussi éloignée de sa base et où la société française montre des signes de délitement, le rugby tricolore se retrouve en lui-même. Au meilleur moment.

mardi 24 mai 2011

Une très grande coupe d'Europe


      Nous pensions avoir vu le plus beau match de la coupe d’Europe avec le Toulouse-Leinster de la demi-finale. C’était sans compter sur une finale exceptionnelle, tant par le rythme de jeu que par son déroulement si étonnant. Les Anglais de Northampton et les Irlandais du Leinster ont donné à voir un jeu plein, d’une rare intensité physique, empli de passes, de courses et de jolis coups de pied. Le tout agrémenté d’un nombre de fautes minime.
     Il était évident que la qualité de la coupe d’Europe s’améliorait au fur et à mesure des années ; elle a atteint en 2011 le summum de ce qui a été donné de voir depuis la première édition en 1996. L’hémisphère Nord n’a ainsi plus rien à envier au Sud et son Super 14. Pour la première fois depuis quinze ans, elle peut même prétendre avoir fait des jaloux de l’autre côté du globe.

     Interrompu par un Tournoi très ouvert, et à quatre mois de la coupe du monde, ce championnat d’Europe offrit dès les demi-finales de véritables confrontations nationales. Le Leinster-Toulouse fut un Irlande-France miniature. A l’image de l’équipe de France (à la seule différence qu'elle est gérée à long terme), Toulouse s’était montrée dangereuse jusqu’au bout, mais avait perdu de 9 points.
    Il n’est pas inutile de rappeler que la province du Leinster forme de son côté plus de la moitié du Quinze du Trèfle, O’Driscoll représentant à lui seul le lien profond entre les deux formations. Longtemps relégué derrière le Munster et ses avants surpuissants, le Leinster est depuis trois ans la meilleure province d’Irlande, largement aidée en cela par l’arrivée de nouveaux joueurs dans le pack et d’une charnière enfin à la hauteur des enjeux.
Quand à Northampton, elle est l’équipe par laquelle se sont révélées les deux nouvelles terreurs des lignes arrière anglaises, Ashton et Foden. Inconnu il y a encore deux ans, Ben Foden s’impose comme l’arrière le plus intelligent et le plus doué du rugby mondial.

     Foden-O’Driscoll : on espérait des duels entre ces deux hommes, le grand relanceur contre le grand capitaine. Nous avons été servis en première mi-temps, l’Anglais gagnant sur toute la ligne, à l’image de son équipe. 25ème minute : attaque des Irlandais, qui déchirent le rideau de Northampton. O’Driscoll se retrouve en position d’attaque, forcé de courir en diagonale, avec pour seul obstacle avec la ligne d’en-but Ben Foden. L’Anglais le plaque sans coup férir, et provoque un en-avant de l'attaquant (voir la vidéo). Quelques minutes plus tard, l’inverse se produit, l’arrière Anglais filant à l’essai après un placage manqué du n°13 du Leinster.
    Deux actions qui symbolisent le calvaire, voire l’humiliation, subie par les Irlandais en première période. Concassés comme rarement en mêlé, incapable de contenir la fougue et l’orgueil des Anglais, dominés en période de supériorité numérique (carton jaune pour Mujati), le Leinster a pris 22 points contre seulement 6 de marqués.

La deuxième mi-temps allait montrer un tout autre spectacle et révéler les capacités mentales puissantes des joueurs Irlandais.

    Relancés par un essai rapide du numéro dix Sexton, appelé à prendre définitivement la relève d’O’Gara en équipe nationale, les maillots bleus du Leinster déferlèrent comme une mer en furie sur les digues anglaises, provoquant de fréquentes ruptures. Tranquillisés par leur avance, les Anglais se sont-ils reposés sur leurs lauriers à la mi-temps ? Ont-ils été surpris par le fighting spirit du Leinster, qui retrouvait enfin son niveau de jeu ? C’est possible, au regard de leur incapacité à garder le ballon une fois qu’il était dans leurs mains (seulement 20% de temps de possession pour Northampton dans les dix premières minutes !).

    Ce qui étonne de la part des Irlandais, c’est leur volonté de ne rien lâcher, même revenus au score. Tel un chien têtu sur sa proie, ils ne donnèrent pas la moindre occasion à Northampton de se dégager de la tenaille, donnant la même impression de volonté totale et jamais lassée entraperçue lors de la réception de l’Angleterre dans le Tournoi. A telle enseigne qu’ils prirent inexorablement le large au tableau d’affichage, et, avec 11 points d’avance, gérèrent les dix dernières minutes. Selon l'ancien international Alain Penaud, « cette équipe touche la perfection dans de nombreux domaines ».

Une petite vidéo des meilleures moments de la rencontre (les commentaires sont en anglais) :



     Cette coupe d’Europe montre une nouvelle fois les capacités mentales exceptionnelles des joueurs irlandais, certainement pas étrangères à leur histoire longue : dix ans de victoires et quelques déceptions, après avoir été le souffre-douleur du rugby mondial pendant tant d’années (cf le message du 1/04 : http://lerugbyinternational.blogspot.com/2011/04/retour-sur-le-tournoi-lirlande-la-plus.html). Une Irlande vieillissante à l’image d’O’Driscoll ? Peut-être. Mais une équipe qui a les ressources nécessaires pour terminer en beauté sa grande décennie, c’est-à-dire une demi-finale lors de la prochaine coupe du Monde...

vendredi 1 avril 2011

Retour sur le Tournoi : l'Irlande, la plus dangereuse pour l'hémisphère Sud ?

    Comme nous nous y attendions, le Tournoi a été très ouvert, très serré, mais remporté par l’Angleterre. Il confirme la perte de vitesse du Nord face à l’hémisphère Sud (déjà visible lors du Tournoi 2010), avec ses équipes en construction (Angleterre), celles qui pâtissent d’une absence totale de politique de long terme (France), ou les nations dans un déclin relatif (Irlande). Il montre néanmoins que nous possédons dans l’hémisphère Nord une bonne réserve de joueurs de talents.
Petit passage en revue. Pour commencer, l’Angleterre et l’Irlande.


    L'Angleterre de retour, mais encore en construction

   L’Angleterre a logiquement gagné le Tournoi, et confirmé le bien qu’on pensait d’elle depuis les tournées de l’été dernier. Après quelques années de passage à vide, touchant le fond au début de l’ère Johnson, elle retrouve le rang international qui a presque toujours été le sien. Elle reste néanmoins une équipe en construction, comme l’a prouvé une deuxième partie de Tournoi pénible. Après avoir été quelque peu accrochée par l’équipe de France, elle s’est fait une sueur froide contre l’Ecosse à Twickenham puis a sombré en Irlande. Il est très rare de voir l’Angleterre prendre ainsi l’eau, être archi dominée durant la majeure partie d’un match. A notre connaissance, il faut remonter aux catastrophiques tournées de novembre 2008 ou à la défaite 43-13 en Irlande il y a quatre ans pour retrouver trace de matchs semblables, et parlons-nous là d’une des pires périodes qu’ait traversé le rugby anglais dans son histoire internationale !
  La déroute irlandaise prouve que cette équipe assez neuve manque d’expérience. Des avants de qualité mais sans joueur d’exception, un poste de demi de mêlée toujours pas pourvu d’un titulaire indiscutable, une évidente faiblesse chez les trois-quarts centre… Le tout partiellement compensé par deux ouvreurs talentueux (Flood et Wilkinson) et une ligne d’attaque pétillante (Foden, Ashton…). L’Angleterre est loin d’être la meilleure équipe du monde mais elle sera dangereuse à l’avenir. La longue parenthèse des dernières années est terminée.


       Irlande : la plus dangereuse pour l'hémisphère Sud ?

    Les Anglais ont beau avoir remporté le Tournoi, l’équipe la plus dangereuse pour l’hémisphère Sud dans l'optique de la prochaine coupe du monde semble être l’Irlande. Nous avions souligné le faux-semblant qu’avait constitué le match d’ouverture du Tournoi en Italie (victoire d’un point) (http://lerugbyinternational.blogspot.com/2011/02/irlande-france-gare-la-premiere-journee.html) , affirmant que « Pour peu que l’Irlande retrouve un peu de son fighting spirit d’antan (et peut-être aussi quelques joueurs actuellement blessés), elle pourrait bien être l’équipe à battre dans ce Tournoi ». En effet, « après dix ans de victoires et de matchs de très haut niveau, l’Irlande a désormais une connaissance intime de ses propres forces et faiblesses ».  La performance exceptionnelle contre l’Angleterre nous conforte dans cette opinion.

    Il est clair que le Quinze du Trèfle est sur une pente descendante depuis une bonne année, à l’image de la paire de centres O’Driscoll-D’Arcy et des avants du Munster (province qui n’a d’ailleurs pas réussi à se qualifier en quarts de finale de la Coupe d’Europe). Néanmoins, sa longue expérience, sa confiance, son homogénéité rugbystique et culturelle en font l’une des équipes les plus solides du rugby mondial. De plus, certains postes ont été renouvelés avec succès, que ce soit aux ailes (Bowe, Earls…), dans la troisième-ligne (Heaslip, O’Brian), ou à l’ouverture avec Sexton (qui a néanmoins des leçons à prendre de l’extrême intelligence de jeu de Ronan O’Gara). L’Irlande est peut-être vieillissante, mais jamais elle n’a produit un jeu si plein dans la première moitié des années 2000. A l’inverse, elle ne subit plus de roustes dans le Tournoi, comme ce fut souvent le cas au début de l’autre décennie.

   Il faut bien comprendre que le Quinze du Trèfle a de tous temps été le parent pauvre de l’hémisphère Nord. Son ascension fulgurante à partir de l’an 2000 – en parallèle de celle de Brian O’Driscoll, l’un des plus grands joueurs de l’histoire – ne s’est pas accompagnée immédiatement de victoires de prestige. Il lui a fallu deux ans pour gagner enfin contre un pays du Sud, puis deux autres années pour en remporter une seconde victoire. Pire, près de neuf ans pour gagner enfin le Tournoi (avec le Grand Chelem en prime). Un temps nécessaire pour se roder au niveau international, mais aussi pour s’habituer psychologiquement à ses nouvelles possibilités. La mémoire puise sa source dans des « temps immémoriaux »…
Cette maturité tardive de l’Irlande pourrait causer de grandes surprises à la prochaine coupe du Monde. Et si les hommes en vert atteignaient les demi-finales, alors qu’approche la fin de l’ère O’Driscoll ?

mardi 15 mars 2011

Quelque chose ne tourne vraiment pas rond...

         Nous nous réjouissons pour les italiens de cette victoire si précieuse contre le Quinze de France (21-20), de la joie qui les a envahis au coup de sifflet final. Plus les minutes passaient, plus le dénouement se devinait. Il est des atmosphères particulières qui en disent plus sur le résultat final d’un match très serré que l’analyse de la rencontre. Il planait samedi après-midi à Rome cette ambiance particulière de l’exploit, car le public italien – qui mûrit dans sa connaissance du rugby – savait que c’était possible, et les chefs du Quinze d’Italie (Bergamasco en premier lieu) affichaient une posture à la fois humble et conquérante.


        Une mécanique psychologique qui se dérègle

     De notre côté, la défaite est révélatrice de beaucoup de problèmes profonds. Jusqu’à samedi dernier, les matchs en Italie nous avaient toujours bien réussi. Depuis dix ans, l’équipe de France y montrait une belle envie de jouer et de vivre son rugby, y inscrivant plus de quarante points en moyenne et de nombreux essais. Cette régularité dans un rugby plein d’allant n’était pas anodine : la douce ambiance de Rome, la tranquille légèreté qui baigne ce stade Flaminio à taille humaine, l’absence de pression, conviennent parfaitement à notre caractère. Les Français ne sont jamais aussi bons que quand ils se sentent libres, ne ressentent pas trop de pression et gardent le goût de la vie. Les déplacements à Rome nous offrent cela, contrairement aux pénibles France-Italie à Paris.
Si cette belle mécanique s’est autant déréglée, c’est que quelque chose ne tourne vraiment pas rond…

     Au risque de nous répéter, les changements fréquents voulus par les sélectionneurs depuis trois ans, les choix illogiques, la politique du « joueur en forme du moment » ne permettent pas de construire une équipe. Nous pensions avoir vu le pire avec Bernard Laporte, mais son successeur le surpasse en ce domaine. Il cède ainsi à l’air du temps, ou plane avec : cette dictature de l’immédiateté, cet état d’urgence permanant, qui n’est que la marque d’une absence de sérénité psychologique, cette incapacité à construire tranquillement.
   Plus grave, la politique actuelle mène aussi à la médiocrité. Ainsi, des joueurs d’exception – tant sur le terrain qu’au niveau de l’esprit – seront traités de la même manière que des petits nouveaux qui doivent faire leurs preuves, ou que des joueurs moyens. Or, si les êtres humains ont les mêmes droits, ils ne sont pas égaux, des têtes ressortent toujours du lot et un sélectionneur doit savoir les reconnaître. Mais l’époque est à l’uniformité et au règne sans partage du présent.


       Dictature de l'immédiat et absence de psychologie     

      Nous nous étions étonnés, avant les tournées d’Automne, de ne pas voir figurer dans le groupe certains trois-quarts toulousains d’exception (Heymans, Clerc…), et avions noté la réaction du perspicace Alain Penaud, qui s’était plaint de l’infantilisation provoquée par les discours et la politique de Marc Lièvremont. Depuis, les bisbilles constatées entre le sélectionneur et certains joueurs n’ont fait que renforcer le malaise, et la dernière conférence de presse rend les choses évidentes : ce sélectionneur, ainsi que les instances dirigeantes du rugby national qui l’ont désignées, ne traite pas les joueurs en tant qu’hommes, il les considère comme ses « garçons » et joue à faire de l'ironie mal placée quand un résultat lui déplait (« Vous croyez qu’ils sont capables de s’autogérer ?... » asséné avec un petit air narquois après la défaite). Venant d’un « garçon » de quarante ans qui n’a pas de grands résultats à son actif dans sa courte carrière d’entraîneur, cette attitude a de quoi étonner…

     La faillite des instances dirigeantes du rugby national laisse une désagréable impression de gâchis. Car le vivier français est extraordinairement riche, et il y a aujourd’hui davantage de rugbymen accomplis que sous l’ère Laporte.  Quand on voit les qualités morales et l’esthétique d’un joueur comme Aurélien Rougerie, qui a pleinement assumé son poste de second trois-quarts centre après y avoir été brutalement parachuté, on se demande comment ce joueur a manqué tant de rencontres du Quinze de France ces dernières années. Pêle-mêle viennent à l’esprit les « sanctions » infligées aux toulousains cités plus haut, mais aussi l’écartement des Beauxis, Picamoles, Bastareaud ou Millo-Chluski, tous ayant d’évidentes graines de champion en germe. Et c’est sans compter les joueurs fréquemment « déselectionnés » (Harinordoquy, Chabal…), qui sont au sommet de leurs carrières. Oui, il y a de belles choses à faire et la direction de l’équipe de France gâche le potentiel tricolore.

     Les problèmes du sélectionneur actuel ne sont que l’avatar d’un mal qui touche les instances fédérales, et plus en amont, la société. L’absence de sérénité, le culte de l’immédiateté et la volonté d’uniformisation sont un trait de l’époque. Si nous attendons avec impatience la nomination d’un Berbizier ou d’un Novès à la tête des Bleus, nous doutons que cela puisse arranger tous nos maux. Les yeux braqués sur un seul homme ne sied guère à notre état d’esprit. Une pression énorme posée sur une autre équipe de France comporterait même le risque de détruire davantage notre confiance si les évènements tournaient mal.


           Un mal psychologique profond dans les instances fédérales ?

     Certes, au regard de la qualité de ses joueurs, l’équipe de France montrera sans doute de belles choses à l’avenir, peut-être même durant la coupe du monde, ce qui ne manquera pas de surprendre les observateurs étrangers.
Cependant, tant que règnera dans la fédération le culte tout républicain de l’instant et de la « nouveauté toujours renouvelée » (qui n’en ignore pas moins la Res Publica, la chose publique, tout occupés que sont ses dirigeants à faire régner leurs petites envies ou idéologies personnelles), tant que la politique de table rase dominera les esprits, il n’y aura ni bonheur ni victoire durable.

    Symbole de ce mal idéologique profond qui ronge nos instances, la proposition du président de la fédération – Pierre Camou – de créer des provinces en France, au moment même où le championnat de clubs connaît ses plus grands succès tant auprès du public que des joueurs étrangers. Vous avez dit destruction ?

    Une solution ? Peut-être lier davantage les grandes décisions pour le rugby national à la vie des clubs. Laquelle, en dépit d’un professionnalisme clairement déstabilisant (comme à chaque fois qu’apparaissent des histoires d’argent), représente le rugby français dans toute sa richesse et, en partie, sa sagesse.

Tournoi : le retour de la logique

   
      Après une deuxième journée bizarre, la troisième journée du Tournoi avait consacré le retour de la logique. Le quatrième volet confirme les évolutions profondes de chacune des nations engagées.

   --  L’équipe d'Angleterre continue de se construire, ses nouveaux talents montent en puissance et prennent confiance. Il lui manque des qualités dans le jeu au pied et un peu de génie au niveau des trois-quarts centre, mais, avec l’immense gâchis que constitue la gestion de l’équipe de France (voir plus haut), elle se révèle incontestablement être la meilleure équipe de l’hémisphère Nord.

  --  L’Angleterre aura néanmoins fort à faire lors de son déplacement en Irlande pour remporter le Grand Chelem. Le Quinze du Trèfle est certes vieillissant, et le Tournoi actuel marque le net déclin de la fabuleuse paire D’Arcy-O’Driscoll ainsi que d’une partie des avants du Munster. Néanmoins, après dix ans de victoires et de matchs de très haut niveau, l’Irlande a désormais une connaissance intime de ses propres forces et faiblesses, ce qui en fait une équipe dangereuse. La prendre à la légère, c’est s’exposer à perdre, comme l’a appris à ses dépens l’Ecosse (qui avait choisi de titulariser un jeune ouvreur sans expérience, lequel était passé à côté de son match).

  --  Le Quinze du Chardon a déçu dans ce Tournoi. Nous apprécions le courage de ses joueurs, qui, depuis quelques années, permettent au rugby écossais de ne pas sombrer définitivement dans la plus grave crise humaine et financière de son histoire. Mais en dépit de trois matchs assez serrés (France, Irlande, Angleterre), l’Ecosse a toujours semblé à la traîne dans le Tournoi. Pourtant, des lumières demeurent. Inconnu jusqu’alors, le jeune deuxième-ligne Richie Gray est la révélation des Six Nations, tandis que le nouvel ouvreur Ruaridh Jackson a montré une belle abnégation au combat contre l’Angleterre, rattrapant au passage son match complètement raté contre l’Irlande. La réception samedi prochain d’une Italie en plein élan victorieux sera intéressante à suivre.

  --  Terminons par la plus grande surprise du Tournoi, le Pays de Galles. Après neuf défaites et un nul lors des dix dernières rencontres, les Diables Rouges ont renversé la vapeur et connu trois victoires convaincantes. Le retour de James Hook, titularisé deux fois au poste d’ouvreur, et celui de Jamie Roberts – qui avait disparu de la circulation depuis ses très bonnes prestations avec les Lions britanniques il y a un an et demi – ne sont pas étrangères à cette percée. Le plus étonnant est néanmoins la puissance de ses avants (à suivre, le jeune troisième-ligne aile Sam Warburton), un fait d’autant plus remarquable que le Pays de Galles a perdu sur blessure dès avant le Tournoi ses deux piliers titulaires. Samedi prochain, l’équipe de France aura un adversaire à sa taille pour se racheter de sa défaite en Italie.

vendredi 18 février 2011

Une journée étrange...

La deuxième journée du Tournoi nous a offert un spectacle bien ... étrange.

  Une Italie amorphe

    L'Angleterre a écrasé l'Italie, et les commentateurs ont rivalisé de superlatifs pour louer l'excellent Quinze de la Rose. Il nous a semblé que l'Italie est passée à côté de son match, semblait étonnamment amorphe, en particulier dans son excellent pack d'avants. La fragilité défensive extrême de son numéro 10 Orquera, qui, bien que bon joueur de main, ne pèse lourd ni en défense ni dans le jeu au pied, a considérablement augmenté les difficultés italiennes.
L'Angleterre est en bonne voie dans le Tournoi, gageons que l'Italie offrira un autre visage à ses prochains adversaires.

    Autre étrangeté, l'apparente incapacité écossaise, et la lourde défaîte du Quinze du chardon à domicile (6-24). Si un concours de circonstances explique la compétitivité retrouvée des gallois - neuf défaites et un nul sur les dix derniers matchs, changement d'une grosse partie de l'équipe contre l'Ecosse, notamment des postes charnières (15 - 10 - 8) - , l'Ecosse est retombée dans ses travers. On a crû revoir l'équipe de l'horrible période 2000 - 2005, celle qui était incapable de marquer un essai et de s'arracher aux chaînes qui les enserraient dans les rencontres internationales. L'incapacité des écossais à marquer quand les gallois furent réduits à treize est à l'image de la partie.

  Ecosse : rechute ou passage à vide ?

L'Ecosse de samedi dernier n'était pas celle que l'on a vu contre la France à Saint-Denis, ni celle de la victoire de cet automne contre l'Afrique du sud, pas plus que l'équipe victorieuse de sa tournée d'été en Argentine ou celle qui a vaincu l'Irlande à Dublin l'an dernier. Elle ressemblait davantage à l'atone équipe de la raclée contre la Nouvelle-Zélande en novembre dernier.
Telle une personne en sortie de dépression, l'Ecosse semble rechuter parfois. Cependant, si l'équilibre reste fragile (le rugby écossais traverse la plus grave crise de son histoire), le Quinze du chardon nous semble bel et bien sorti du tunnel. La combativité et l'intelligence de jeu exemplaires d'un Sean Lamont, entré en première période pour remplacer le fantômatique Southwell (d'habitude sûr à son poste), la volonté totale de l'ailier Max Evans, qui n'a jamais été aussi bon depuis que son frère - le grand espoir Tom Evans - a frôlé la tétraplégie (voire la mort, selon ses médecins) l'an dernier dans le Tournoi, seront, espérons-le, des phares pour le rugby écossais.

  En attendant France-Angleterre...

   Nos considérations sur l'équipe de France et le match en Irlande seront réservés à un autre message. Notons néanmoins que les sélectionneurs peuvent dire merci à des joueurs de grande classe largement ignorés ces dernières années, tel Aurélien Rougerie. Nous nous félicitons aussi de la combativité des Bleus en phase défensive, quand la furia irlandaise attaquait notre ligne d'en-but. Enfin, nous pouvons dire merci aux avants irlandais, coupables de fautes flagrantes et inutiles qui nous ont donnés la victoire (6 pénalités tout de même, merci à Parra également !).
Nous nous délectons à l'avance du choc contre l'Angleterre dans un peu plus d'une semaine, mais il nous en faudra plus pour gagner contre le Quinze de la rose. Peut-être se resserrer sur les joueurs d'exception. Les qualités sont là, manque une politique de longue durée.

Ps : nous venons d'apprendre le recrutement de Lionel Beauxis à Toulouse. Une très bonne nouvelle. Peut-être les sélectionneurs pencheront-ils davantage la tête sur les faits d'armes de cet ouvreur si intéressant.

jeudi 10 février 2011

Irlande - France : gare à la première journée des faux-semblants !

    Pour la seconde journée du Tournoi, nous suivrons avec attention la performance de l'Ecosse et le déplacement de Quinze de France en Irlande, un moment toujours particulier en dépit de la destruction du vieux stade de Lansdowne Road qui correspondait si bien à l’état d’esprit irlandais.

L'Irlande sera difficile à battre dans ce Tournoi

   L'Irlande n'a gagné que de deux petits points en Italie samedi dernier, mais cette rencontre est un faux-semblant de la compétitivité irlandaise. Face à l’excellente défense italienne, le Quinze du Trèfle a réussi à percer de nombreuses fois, failli marquer des essais et refuser de taper les ballons au pied… Les irlandais nous ont pourtant semblé peu motivés, un peu endormis en ce début de Tournoi, et de nombreux joueurs manquaient à l’appel (ainsi, l'équipe comptait dans ses rangs deux piliers et un arrière quasi novices, tandis que le troisième-ligne centre n’était que le troisième choix suite à des blessures ; dimanche le numéro 8 titulaire sera de retour).

  Néanmoins, alors même que nous entrons dans la phase descendante de l’ère O’Driscoll (avants du Munster, trois-quarts centres…), le groupe irlandais nous semble être encore plus homogène et plus serein que par le passé, plus sûr de lui, car ayant une conscience très fine de ses forces et de ses faiblesses. La facilité, la rapidité et la sérénité avec lesquelles les irlandais sont revenus au score à deux minutes de la fin du match, juste après un essai italien qui mit le feu au stade, est selon nous révélateur de cette profonde confiance intérieure. Pour peu que l’Irlande retrouve un peu de son fighting spirit d’antan (et peut-être aussi quelques joueurs actuellement blessés), elle pourrait bien être l’équipe à battre dans ce Tournoi.

   Des internationaux de classe, une défense qui manque de repères

    L’équipe de France donne l’impression contraire. Alors que nous possédons un formidable vivier de joueurs, et des internationaux qui ont une classe et sont d'une noblesse admirables, les dirigeants français du rugby – ou plutôt ses fameuses « élites » - entretiennent le changement permanent et n’ont aucune vision de longue durée. On peut également s’étonner de l’incapacité des sélectionneurs à remarquer les joueurs d’exception, qui sont souvent à bien des égards des êtres très particuliers sur le plan mental. Samedi dernier, les titulaires ont fait honneur à notre beau maillot bleu, attaquant avec fougue et montrant pour certains des qualités exceptionnelles (Médard, Rougerie, Servat, Dusautoir…).
 Mais l’absence d’homogénéité dans l’équipe – comment bien jouer ensemble quand on n’a jamais joué ensemble ? – le soudain parachutage de certains joueurs en forme mais pas encore tout-à-fait confirmés (Huget, Pierre, et même Mermoz) ont une conséquence immédiate : une défense fébrile. Trois essais encaissés contre une Ecosse qui en d’autres temps aurait craqué, combien contre l’Irlande ou l’Angleterre ? Cela ne dépend pas suffisamment de nous.

Une courte vidéo des joutes terribles disputées dans l'ancien Lansdowne Road (et ce public si fougueux et sympathique qui déborde de joie ... et des tribunes ) :



   L'Angleterre se construit tranquillement, Galles semble perdu

  L’Angleterre confirme son retour après quelques années de brouillard, grâce à des avants toujours solides, leurs nouveaux trois-quarts rapides et sûrs, et un Toby Flood qui commence à prendre une belle ampleur au poste d’ouvreur. Un classique qui a toujours fait les grandes équipes d’Angleterre. Mais gare, la perfide Albion est toujours en construction.

  Le Pays de Galles ne peut en dire autant. Nous reviendrons une prochaine fois sur l’étonnante évolution en dents de scie des Diables Rouges ces dernières années. Une remarque d’ors et déjà : leur extraordinaire entraîneur Warren Gatland, qui avait été l’un des grands artisans de l’élévation de l’Irlande il y a un peu plus de dix ans, qui avait si bien dirigé les équipes des Wasps et de Waikato par la suite, n’arrive pas à avoir affaire avec les Gallois. Ces derniers sont parfois difficiles à saisir, ils fonctionnent sur des longueurs d’ondes très particulières que de toute évidence M. Gatland ne parvient pas à capter.

vendredi 4 février 2011

Aah, le bon vieux Tournoi !...


    Le Tournoi va commencer, c’est à chaque fois un délice en ce début d’année. Tout d’un coup ressortent les images de la tendre enfance, les matchs rudes et fougueux en Irlande, les confrontations à la tombée du jour dans la mystérieuse Ecosse, alors que des champs de cornemuse transpercent la brume, les défis chaque fois renouvelés contre l’Angleterre, l’assurance de jolis matchs contre les gallois… Le public, la chaleur humaine, la découverte d’autres contrées, d’autres identités, la courtoisie obligatoire…
Voici le Tournoi !

   La rencontre de ce soir sera très intéressante. Non par la tranquille détestation réciproque que ressentent anglais et gallois, mais parce que les premiers sont en train de sortir de quelques années de brouillard (avec une ligne de trois-quarts à surveiller de près), et les seconds toujours capables d’être très compétitifs (comme ils l’ont montré contre la Nouvelle-Zélande en novembre dernier).

  Allez, un petit pronostic ? Eh bien, le Tournoi de cette année a beau être très ouvert (ainsi le niveau de l’équipe de France et d’Irlande constituent deux grandes inconnues), je vais néanmoins avancer un petit avis : victoire de l’Angleterre et bonne place de l’admirable Ecosse (il faut remonter à 2006 puis 1999 (victoire) pour voir l’Ecosse remporter trois victoires dans le Tournoi).

Un petit plaisir pour mettre en bouche avant le début du Tournoi, l'hymne gallois depuis les tribunes :

jeudi 3 février 2011

Dernier regard sur les tournées d'automne : une image de l'année 2011 ?

   Alors que va débuter le Tournoi en cette fin de semaine, un dernier coup d’œil dans le rétroviseur pour revoir les tournées d’automne, riches d'enseignements.


      La Nouvelle-Zélande au sommet 

  Premier enseignement, rarement une équipe aura autant dominé le rugby mondial que la Nouvelle-Zélande de ces dernières années. Les Blacks, qui ont battu toutes les nations des îles britanniques en marquant une moyenne de 4,5 essais par match, paraissent encore plus forts que lors de la période 2005 – 2007, celle qui avait vu les hommes en noir écraser les Lions britanniques et ne connaître que 3 défaites en 28 matchs.
 Avant la tournée dans l’hémisphère Nord, la Nouvelle-Zélande a réussi un « grand chelem » dans le tri-nations malgré l’interminable nouvelle formule (6 rencontres), une première. Cette fois, c’est sûr, la Nouvelle-Zélande gagnera la coupe du monde.


      Talent national gâché 

  En France, les sélectionneurs restent dominés par leurs besoins de bougeotte, si bien qu’aucune équipe ne peut voir le jour durablement. Cela fait plus de dix ans que ça dure, plus de dix ans que le quinze national connaît des moments d’espoir suivis de roustes insupportables. La défaite contre l’Australie (16-59) aurait pu être évitée, nous avons un vivier de joueurs extraordinaires qui ne demandent qu’à éclore, mais nous cultivons l’instabilité extrême à l’instar de notre régime politique. Manque flagrant de sérénité, non chez les joueurs, mais dans la tête des « élites » rugbystiques. Ma foi, l’équipe de France rassemble en miniature les problèmes du pays…

 La sélection du Quinze pour le premier match du Tournoi ne nous rassure pas outre mesure. Gageons qu’en 2011, le rugby français connaîtra encore des joies (considérées comme des surprises à l’étranger) et des blocages pénibles.


     L'Angleterre de retour, les îles du Pacifique très compétitives

  Après avoir dominé le rugby mondial dans les premières années du millénaire, la perfide Albion a régressé petit à petit, pour tomber très bas dans les premiers temps de l’ère Martin Johnson. Mais la faiblesse rugbystique des anglais n’a que trop duré, et il faut s’attendre à les voir revenir dans le jeu des grandes puissances de l’Ovalie.
 Emmenés par une nouvelle ligne de trois-quarts pétillante – à l’instar de l’arrière Ben Foden, feu-follet droit comme un I – et des espoirs comme le demi de mêlée de 21 ans Youngs, l’Angleterre a battu l’Australie chez eux cet été, résisté face à la Nouvelle-Zélande cet automne puis superbement dominé les wallabies à Twickenham (35-18). Il va falloir s’attendre à revoir les hommes en blanc en haut de l’affiche dans les prochaines années.

  L’autre information du mois de novembre est la compétitivité retrouvée des îles du Pacifique. Les Samoa, historiquement la meilleure d’entre elles, n’a perdu que de dix points en Irlande, donné du fil à retordre à l’Angleterre, puis a frôlé l’exploit contre une Ecosse légèrement remaniée (défaite 19-16 avec une pénalité litigieuse pour le quinze du Chardon à la dernière seconde). Quant aux Fidji, ils ont de nouveau mis à mal les gallois, avec un match nul rarissime (16-16). Même les Tonga de loin la moins forte des îles, ont connu leur heure de gloire avec une victoire contre les Barbarians français. De bon augure pour la coupe du monde néo-zélandaise, en plein océan Pacifique…