mercredi 26 octobre 2011

Les Blacks, enfin


     Dimanche dernier, nos joueurs ont fait honneur à notre pays. Ridiculisés en poule et en demi-finale, insultés par les médias néo-zélandais et raillés par le public, ils ont eu contre la Nouvelle-Zélande un sursaut d’orgueil rare.

Le plus incroyable dans le déroulé de cette finale réside dans la capacité tricolore d’attaquer et de défendre en restant soudé, malgré la révolution permanente opérée par le sélectionneur depuis quatre ans. Chaque joueur a tenu sa place et son rôle. L'équipe de France a été belle à voir.

Mérité, les All-Blacks

    Certes, nous avons plus ou moins dominé cette partie ; certes, l’arbitre avait décidé de laisser gagner les Blacks. Fort heureusement, nous ne sommes pas champions du monde. Comment se serait-on regarder dans la glace si tel avait été le cas ? Deux défaites en poule, une désillusion contre l’Italie dans le Tournoi, une rouste historique face à l’Australie il y a un an…
Et si nous avions volé la coupe aux Blacks dans leur antre de l’Eden Park ? Eux qui ont largement dominé non seulement la compétition, mais les six ou sept dernières années au niveau international ?

Rarement l’expression « LEUR coupe du monde » a été aussi vraie. C’était leur heure. Et grâce à leur victoire, le grand rendez-vous international créé en 1987 garde une légitimité.

Un premier bilan

    Deux faits, selon nous, ressortent nettement des six semaines de rencontres aux antipodes.

Le premier, c’est qu’une équipe a sur-dominé la compétition (la Nouvelle-Zélande). La seule fois où les Blacks ont été inquiétés, c’était en finale, quand ils ont eu du mal à évacuer l’énorme pression qui pesait sur leurs épaules.

En second lieu, le niveau a été relativement peu élevé – tout du moins très irrégulier – et la logique n’a pas été respectée par rapport aux phases de poule. Non seulement une équipe (la France) est sortie de son groupe avec deux défaites, une grande première, mais les nations présentes en demi-finales comptaient déjà quatre échecs dans la compétition !
Or, depuis 1987, jamais on n’était monté au-delà de deux unités ; et encore, cela ne s’était produit qu’en 2007, année qui avait vu pour la première fois une nation vaincue en phase de poule accéder à la finale (l’Angleterre).

Cela fait beaucoup de retournements improbables pour une compétition censée être relevée et passionnante.

Baisse de niveau chez les buteurs ?

    Autre fait marquant, la faillite des buteurs. Il est rare de voir autant de ratés, jusqu’en finale (deux pénalités faciles manquées par Weepu). Beaucoup mettent en cause le nouveau ballon, apparemment difficile à ressentir lors des coups de pied. Mais n’y a-t-il pas tout simplement une baisse de niveau ?

Il est des époques où la réussite des pénalités conditionne une victoire. Visiblement nous n’en vivons pas une. Plusieurs nations lancent des botteurs « improvisés » avec plus ou moins de réussite (NZ après la blessure de Carter, Australie, France évidemment), d’autres changent de tireurs en plein milieu d'une partie ; la seule qui possède un métronome de la trempe d’un Jenkins ou d’un Wilkinson des grandes années est l’Afrique du Sud, avec Morné Steyn, mais elle a été éliminée dès les quarts de finale.

    Dans cette coupe du monde, des nations ont agréablement surpris (Galles, Argentine) et d’autres ont beaucoup déçu (Angleterre, Australie). Certaines se sont construit un avenir (l’équipe de France) et l’une d’entre elle demeure trois crans au-dessus (Nouvelle-Zélande). Pour l’avenir, ceux qui pensent que les Blacks vont lever le pied risquent d’être déçus : 2012 pourrait encore être une « année noire »…

lundi 17 octobre 2011

Une drôle de coupe du monde...

    
     Etonnante, mais pas passionnante à vrai dire…
Si ce n’était l’intérêt immense pour nous autres Français de voir une finale Blacks-Bleus à l’Eden Park, nous dirions même que cette coupe du monde frise le n’importe quoi.

    Pour illustrer notre propos, il n’est qu’à regarder les demi-finales. Une équipe présente dans le dernier carré (la France) a subi deux défaites en matchs de groupe. Jamais une nation n’était sortie de cette phase après avoir connu deux échecs. Une autre (l’Australie) comptait déjà une défaite et avait terminé deuxième de sa poule.
La qualité des demi-finales ne trompe pas. Les Bleus ont gagné péniblement d’un petit point contre une équipe de Galles réduite à quatorze au bout de vingt minutes (carton rouge rarissime à ce niveau). Les Australiens se sont faits étrillés 20 à 6 par une Nouvelle-Zélande largement supérieure.

Des quarts peu logiques

    Dès les quarts, il soufflait un vent de farce. L’Afrique du Sud avait sur-dominé une Australie étonnamment amorphe mais avait perdu néanmoins, ce qui nous a privé du grand duel tant attendu entre les Boks et les Blacks. L’Irlande, qui avait fait le plus dur en battant les Aussies en poule, a été coupable d’un péché d’orgueil contre le Pays de Galles malgré son expérience. L’équipe de France s’est enfin réveillée et a réalisé une première mi-temps d’anthologie contre une équipe d’Angleterre très décevante tout au long de la compétition ; victoire surprise après nos deux défaites en poule.

La Nouvelle-Zélande, dernier pilier du rugby mondial ?

    En fait, des huit équipes engagées en quarts de finale, seules le Pays de Galles, l’Argentine et – bien-sûr – la Nouvelle-Zélande sont restées fidèles à elles-mêmes et ont tenu leurs rôles.

Les Blacks, en particulier, semblent le dernier pilier encore debout d’une ère professionnelle caractérisée par la frénésie. Jamais ils ne se prennent de roustes, jamais ils ne déçoivent. Ils dominent le rugby mondial depuis six ou sept ans et en recueillent désormais le fruit. Leur parcours en coupe du monde est limpide. Ils n’ont jamais été inquiétés dans la compétition malgré la blessure de Daniel Carter – le meilleur ouvreur de la planète. C’est dire leur avance sur les autres nations.

   Ils devront néanmoins se méfier contre la France. Pour l’occasion, les Bleus devraient se magnifier. Ces derniers sont en finale alors qu’ils n’ont bien joué qu’une seule mi-temps dans toute la compétition (la 1ère période contre l’Angleterre). Pour eux, la coupe du monde ne fait que commencer. Ce d’autant plus qu’on sent un profond soulagement à l’idée du départ prochain de Marc Lièvremont.

Ce dernier, qui avait eu un instant de discernement après la défaite contre les îles Tonga (« Qu'ils [les joueurs] fassent sans moi, je ne demande que ça, c'est leur aventure »), est retombé dans ses travers en traitant certains Bleus de « sales gosses égoïstes » et en parlant de « quelques clopes fumées en cachette » sous prétexte d’une sortie en ville après la victoire contre le Pays de Galles. Il ne s’agit pas seulement d’un énième dérapage, mais d’une absence totale de connaissance des joueurs tricolores, de l’âme française.

Prendre du plaisir

    Les Bleus présents en Nouvelle-Zélande n’ont ni envie ni besoin d’un instituteur omnipotent au-dessus de leur épaule. Ce sont des hommes qui savent que notre place en finale est totalement imméritée. Nous n’avons pas d’équipe, et se préparer en faisant comme si c’était le cas est le meilleur moyen de se faire étriller par les Blacks.

Tout ce dont nos joueurs ont besoin est de s’échapper de la promiscuité de l’hôtel, du regard du sélectionneur et des médias, de profiter de leurs derniers instants à l’autre bout du monde, de ne pas craindre une non sélection pour la finale sous prétexte d’une sortie en ville. De respirer et de ne s’appliquer que lors des entrainements, lesquels doivent reposer sur des bases simples. Si elle prend plaisir, l’équipe de France montrera un tout autre visage dimanche. Allez les Bleus !